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Chapter 28 - Chapitre 28 – Réveils troublés et draps emmêlés

Thomas ne se réveille pas vraiment. Pas d’un coup, pas avec ce sursaut habituel qui accompagne les mauvais rêves. C’est… autre chose. Une lente remontée vers la surface, comme s’il était porté par une eau tiède qu’il ne veut pas quitter. Un rêve doux, dépourvu de cris, de bruits métalliques ou de silhouettes qui l’attendent dans l’ombre. Un rêve où, étrangement, il n’avait rien à fuir.

Il n’ouvre pas encore les yeux.

La première chose qu’il perçoit, c’est cette chaleur. Pas celle oppressante d’une couverture trop lourde. Non… une chaleur vivante. Qui respire. Qui se déplace légèrement à chaque inspiration, à chaque soupir. Elle épouse la courbe de son flanc, se glisse dans ses muscles engourdis, et il sent son corps y répondre, comme s’il s’autorisait enfin à se détendre.

Puis, il y a cette odeur. Discrète mais tenace, douce mais pas fade. Un parfum qu’il a déjà senti, porté par un courant d’air dans un couloir, ou accroché au col de son manteau après qu’elle l’a frôlé. Du savon, sûrement, mais aussi cette note fruitée qu’il n’a jamais réussi à identifier et qu’il associe désormais uniquement à elle. Chaque bouffée d’air éveillait en lui une sensation étrange, mélange de réconfort et de gêne.

Sous sa joue, le tissu est tiède et un peu froissé. Ce n’est pas son oreiller. Plus bas, plus ferme. Et, juste devant ses yeux, un rideau de cheveux bruns, emmêlés, qui chatouillent son épaule nue à chaque respiration. Des mèches qui capturent la lumière grise filtrant à travers la fenêtre, comme si elles retenaient des morceaux d’aube. Le frôlement subtil sur sa peau le fait frissonner légèrement, mais il n’ose pas bouger, pris entre le désir de rester ainsi et la peur de briser ce moment.

Son corps se tend légèrement.

Ses paupières s’entrouvrent, avec la lenteur prudente de quelqu’un qui craint ce qu’il va découvrir. La lumière matinale se glisse à travers les rideaux, dessinant des ombres sur le sol et des reflets argentés sur les draps. Et là, lovée contre lui, il voit la silhouette qu’il redoutait — ou espérait — deviner.

Un battement de cœur.

Thomas (pensée) : … J’ai dormi avec Clara.

Deux battements. Plus forts, plus lourds.

Thomas (pensée) : Attends… J’AI dormi avec Clara ?!

Il inspire profondément, puis retient l’air, comme si la moindre expiration pouvait réveiller ce fragile équilibre. Son bras est posé sur elle. Pas autour, pas vraiment… mais assez près pour que ce soit presque un geste protecteur. Une barrière qu’il n’a pas retirée, même en dormant.

Le drap a glissé un peu, dévoilant l’arrondi délicat de son épaule. Une mèche de cheveux s’est glissée dans le creux de son cou, comme un petit secret. Sa peau est pâle sous la lumière, et il doit détourner les yeux pour ne pas la fixer trop longtemps.

Son souffle, à elle, est régulier. Calme. Et chaque fois qu’elle expire, une bouffée d’air tiède vient effleurer sa peau, provoquant un frisson discret. Thomas repense à leurs derniers jours, à la tension accumulée, aux moments où leurs mains se frôlaient par inadvertance. Et maintenant… ce contact paisible, cette proximité, le déstabilise plus que n’importe quel combat.

Puis elle bouge. Pas un grand mouvement, juste un frisson qui parcourt son corps, suivi d’un soupir. Ses doigts, encore engourdis, s’étirent et effleurent son ventre. Il se fige immédiatement. Sous la couverture, ses jambes glissent légèrement contre les siennes dans un geste involontaire, comme si son corps, lui, n’avait pas envie de se séparer.

Clara (voix rauque, engourdie par le sommeil) : « … Thomas ? »

Ses paupières papillonnent. Elle entrouvre les yeux, grogne doucement, puis les referme. Il croit qu’elle va replonger, mais non. Comme frappée par une pensée soudaine, elle rouvre les yeux et le fixe.

Clara (éberluée, voix basse) : « Oh… dis-moi qu’il s’est rien passé. »

Thomas (bafouillant) : « Je… je sais pas… Enfin, je crois pas ?! »

Elle se redresse d’un mouvement vif, le drap suivant le geste et dévoilant un éclat de peau sur son flanc. Thomas détourne aussitôt les yeux, mais ils reviennent presque contre son gré.

Elle inspecte la situation sous la couverture, puis relève un sourcil.

Clara (soulagée) : « Bon. J’ai toujours mon t-shirt… et toi ton pantalon. Même si… on dirait que t’as perdu une bataille contre lui. »

Thomas (vite, défensif) : « C’est le matelas qui penche ! »

Clara (sourire en coin) : « Ou toi qui t’es penché dans la nuit… obsédé. »

Il ouvre la bouche pour protester, mais un petit rire nerveux lui échappe. Elle rit aussi, et la tension s’efface un instant, remplacée par une légèreté presque agréable.

Clara : « Sérieusement… on a l’air de quoi ? Deux gamins pris la main dans le sac après un câlin imaginaire ? »

Thomas (souriant timidement) : « On a l’air de… deux idiots. Mais des idiots qui ont bien dormi. »

Elle se laisse retomber sur le dos, bras écartés, fixant le plafond comme si elle cherchait des réponses dans le vide.

Clara : « Pas de cauchemar… pas de sursaut… c’est presque louche. »

Thomas (hésitant) : « Peut-être… parce qu’on était ensemble ? »

Elle tourne la tête vers lui. Son regard se plante dans le sien, et il sent la chaleur lui monter aux joues.

Clara (moqueuse) : « T’es trop mignon quand tu rougis. »

Thomas (murmure) : « J’rougis pas… »

Elle se redresse légèrement, et son t-shirt remonte, laissant apparaître un éclat de peau où un rayon de lumière vient se poser. Il détourne les yeux… mais pas longtemps.

Clara : « Avoue… t’as flippé en te réveillant. »

Thomas : « Bah… un peu. Tu m’as déjà frappé pour moins que ça. »

Clara (sourire) : « Oh, mais si c’était le cas, je t’aurais pas frappé. Peut-être juste un peu. »

Thomas : « Très rassurant… »

Elle se penche vers lui. Lentement. Ses cheveux glissent sur son épaule et viennent chatouiller sa joue. Son souffle se mêle au sien.

Clara (plus bas, regard sérieux) : « Et si… ça avait été le cas ? Tu regrettes ? »

Il déglutit, incapable de reculer.

Thomas : « Peut-être… pas. »

Le silence qui suit est lourd, presque palpable. Comme si l’air entre eux avait cessé de circuler.

Puis elle franchit la distance. Ses lèvres se posent sur les siennes. Ce n’est pas un baiser pressé. C’est court, mais intense. Assez chaud pour lui couper le souffle, assez doux pour qu’il sache qu’il ne l’oubliera pas.

Quand elle se recule, ses yeux brillent d’un éclat qu’il ne lui connaît pas.

Clara (murmure) : « Comme ça, la prochaine fois que tu te poses la question… t’auras ta réponse. »

Elle se lève, ramasse ses bottes sans se presser. Thomas, lui, reste assis, le cœur battant à tout rompre, les lèvres encore tièdes du baiser.

Il ne sait pas combien de temps il reste là, figé, à écouter le son de ses propres battements de cœur. Mais il sait une chose : peu importe ce qui les attend dehors… tant qu’elle sera là au réveil, il pourra affronter le reste.

Thomas repense à la nuit passée. Leurs discussions interrompues, les éclats de rire tardifs, le silence après la tempête d’émotions, tout semblait les avoir rapprochés. Le fait d’être ici, dans ce calme presque interdit, le rassure autant qu’il l’effraie. Il sent son pouls ralentir doucement, mais son esprit continue de virevolter, revisitant chaque contact, chaque mot échangé.

Clara, de son côté, observe Thomas d’un regard mêlé de tendresse et de curiosité. Elle s’assoit sur le bord du lit, laissant la lumière effleurer sa peau. Ses doigts jouent avec un pan du drap, presque nerveusement, tandis qu’elle se demande si ce baiser a changé quelque chose, ou si tout restera fragile, suspendu entre eux.

Thomas finit par oser un geste. Lentement, il tend la main et effleure son épaule. Clara ferme les yeux un instant, puis sourit légèrement. Ils se regardent, et ce simple échange suffit à dissiper l’embarras. Les mots semblent superflus. Tout est dit dans la chaleur de ce contact, dans la tranquillité qui s’installe enfin.

Leurs pensées dérivent, mêlant souvenirs d’enfance, batailles partagées, et promesses silencieuses. Le monde extérieur, avec ses urgences et ses dangers, semble lointain. Ici, dans cette chambre baignée de lumière grise, il n’existe que le calme, le souffle l’un de l’autre et ce sentiment inattendu mais rassurant d’être enfin proches.

Thomas se lève doucement, passe une main dans ses cheveux, et ose un petit sourire.

Thomas : « Alors… on fait quoi maintenant ? »

Clara (avec un éclat malicieux) : « On savoure encore un peu ce silence, je dirais. »

Et, pour la première fois depuis longtemps, ils restent là, simplement. Ensemble. Sans peur, sans précipitation, avec juste la certitude que, quoi qu’il arrive, ils se réveilleront l’un à côté de l’autre.

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