1. La réunion dans le QG du S.H.A.R.D
Rory :
— « Bon… après l'avoir interrogée, la témoin nous a donné des informations plus que précieuses. Elle a dit qu'elle se souvenait de l'endroit où elle avait été séquestrée. Nous allons aller avec elle dans la forêt, car c'est là qu'il torture des dizaines de personnes. Selon elle, il emmenait une victime chaque semaine. Il y aurait plusieurs otages encore vivants. Donc, la réunion est annulée pour mener une battue dans la forêt. »
La réunion avait été annulée pour mener une battue dans la forêt, menée par une de mes victimes qui avait réussi à m'échapper. Mais, en réalité, elle avait simplement eu de la chance.
J'étais content pour elle. Si le destin en avait voulu ainsi, c'est qu'elle le méritait sûrement.
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2. Ma victime
Je ne l'ai jamais raconté à personne, mais je l'avais laissée partir. Pas totalement… mais elle avait simulé sa mort. Et ce jour-là, j'étais surchargé. J'avais dû tuer la fille qui était avec elle.
Ma chère victime était une bénévole dans une association qui aide les enfants défavorisés. Mais bon… je la voulais. Alors, je me suis servi. Depuis mes treize ans, j'ai coupé court avec les histoires d'amour.
Sauf avec Falone, qui en vérité était la seule que j'ai vraiment aimée.
Cependant, ma victime, c'était autre chose. Si je me souviens bien, elle s'appelait Lucy, dans la quarantaine. Une peau parfaite qui, comme je le pensais, devait être d'une douceur étonnante.
Vous vous demandez sûrement comment j'ai fait la connaissance de Lucy ? En temps normal, je ne dirais rien, juste pour ne pas avoir à vous tuer plus tard. Mais nous sommes amis… alors je vais vous raconter.
Un jour, mon père avait été appelé en urgence. L'association qui aide les enfants défavorisés avait voulu prendre contact avec lui pour lui soumettre un projet. Et selon ses dires, c'était important. Alors il était parti aussitôt. Il connaissait l'association. De toute façon, elle était connue dans la ville et avait un impact fort, même dans d'autres villes.
Deux semaines plus tard, nous avons été invités par cette association, baptisée « La Tendresse du Cœur ». Pendant cette cérémonie, où ma mère et moi étions présents grâce à mon père, nous avons enfin eu vent de ce fameux projet dont il n'arrêtait pas de parler sans jamais en dire la teneur.
Il y avait un homme et une femme sur le podium, les fondateurs : Bernadette et Joe Wallace.
Bernadette :
— « Votre attention, s'il vous plaît !! »
En entendant sa voix résonner à travers les baffles, mes yeux se sont posés sur elle. Pas Bernadette, non. Dans le fond, derrière les membres de l'association qui étaient debout… elle était là. Lucy.
De l'amour ? Non. Quelque chose de plus intéressant. De plus… jouissif pour moi.
La cérémonie continua, mais moi, j'avais déjà trouvé mon jouet. Et rien que cette idée m'excitait. Elle ne m'avait rien fait de mal. On ne se connaissait même pas. Mais je la voulais. Peut-être parce que c'était un visage que je n'avais pas vu un million de fois. Peut-être…
Mais ce qui me plaisait surtout, c'était qu'elle était nouvelle dans la ville.
Mon père fut appelé à monter rejoindre Bernadette et Joe pour l'annonce de la soirée. Ma mère, les yeux brillants, regardait son mari avec fierté.
Joe :
— « Voici monsieur ABOGUÉ. C'est grâce à lui que ce projet, que nous gardions si secret, peut enfin voir le jour. Il a accepté de devenir le directeur et donateur de l'école que nous avons décidé de créer ! »
Toute la foule se mit à applaudir. En réalité, c'était une bonne nouvelle. L'État avait déjà généré des financements pour un projet similaire, mais cela n'avait jamais abouti.
Joe :
— « Et ce n'est pas tout. Nous avons déjà signé les documents de collaboration… et surtout… les travaux commenceront dans deux semaines ! »
Mon père, heureux, parla avec joie :
— « Je suis ravi que l'association La Tendresse du Cœur m'ait contacté pour me parler de ce projet. C'est donc avec un immense plaisir que je me battrai pour qu'il voie le jour. »
Ma mère pleurait de joie. Je ne savais pas pourquoi. Mon père lui avait pourtant menti, mais elle pleurait.
La soirée se termina. J'avais enfin entendu le prénom de mon jouet : Lucy.
En sortant de la salle de cérémonie, nous étions prêts à partir. Alors que nous marchions, elle passa derrière nous, se dirigeant vers sa voiture. Une Toyota blanche, banale dans la ville. Le genre de véhicule qui crie qu'elle vit seule.
Rien qu'en un regard, je savais déjà dans quel hôtel elle pouvait loger. Quand tu as grandi dans un endroit, le moindre changement te saute aux yeux. C'était tout ce dont j'avais besoin pour mettre ma poupée dans sa boîte.
Cela m'a pris du temps… environ un an de chasse. Un an d'étude de ses habitudes.
3. La forêt sanglante
La battue dans la forêt s'organisait. La police de toutes les régions était là. C'était un véritable rassemblement.
Le S.H.A.R.D était mobilisé face à cette vaste forêt. Des hélicoptères tournaient au-dessus, une équipe surveillait la rivière, et des journalistes venus couvrir l'opération s'installaient partout. La brigade canine était là aussi. Les véhicules ne cessaient d'arriver : police, médias, volontaires…
La victime qui s'était échappée, Lucy, et son mari Evan étaient en route, dans leur voiture.
Cependant, Evan n'était pas d'accord pour qu'elle retourne dans cette forêt sans lui. Et il ne s'en cachait pas.
Evan :
— « Non ! Non ! Non !!! Je ne suis pas d'accord. Pourquoi tu ne veux pas comprendre ça ?! »
Evan soupira, s'excusa d'avoir crié et reprit d'une voix plus douce :
— « Je n'aurais pas dû crier… mais écoute, chérie, tu es vraiment sûre de vouloir les accompagner ? Tu ne peux pas simplement leur montrer la zone sur une carte ? Eux-mêmes iront chercher. »
Lucy :
— « Non… si je ne fais que leur montrer sur une carte, cela prendra trop de temps avant qu'ils ne retrouvent les survivants. Il y a des gens qui, comme moi, ont été kidnappés, torturés et… même violés par cet homme. »
Evan :
— « Je comprends parfaitement, mais tu as tendance à trop prendre les choses à cœur, et tu oublies que tu ne peux pas sauver le monde toute seule. »
Lucy, le regard triste et en colère :
— « Tu penses que je fais ça pour jouer les héroïnes ? »
Evan :
— « Non… je ne voulais pas dire ça. »
Lucy :
— « Et pourtant tu l'as dit ! CE MALADE A TUÉ NOTRE ENFANT !!! Il a tué une fille de l'association… celle que j'avais eu la brillante idée d'emmener manger une glace. Est-ce que tu te rends compte ? Je revois sans cesse comment il lui a transpercé le ventre. Il a tué Tane ! »
Lucy pleurait en criant ces mots. Evan ne savait pas comment la calmer.
Evan :
— « Je suis désolé… mais sache que ce n'était pas de ta faute. Tu n'es pas responsable de ce qui est arrivé. Ni de la mort de Tane, ni de la perte de notre grossesse. Notre enfant n'est pas mort à cause de toi. »
Lucy :
— « Oui… tu as raison. Mais… lorsque j'étais sa prisonnière… il m'a servi une partie de la cuisse de Tane. Je ne voulais pas la manger, mais… ça faisait déjà trois mois que j'étais enfermée… et il avait arrêté de me nourrir depuis longtemps. »
En connaissant son mari, Lucy savait qu'il n'avait qu'une envie : tuer cet homme.
Elle posa sa main sur le visage d'Evan et dit doucement :
— « Ne t'inquiète pas, chéri… on va surmonter ça ensemble. »
Evan :
— « Je ne veux plus que quelque chose t'arrive. Je ne veux plus te perdre. »
Lucy :
— « Non… non… il ne m'arrivera rien. Et sache que je t'aime… »
Evan :
— « Je sais que tu m'aimes… et moi aussi je t'aime. »
Lucy :
— « Je sais que tu le sais… mais je ne peux pas m'empêcher de te le dire… Quand j'étais à la merci de cet homme, je ne pensais qu'à une seule chose… »
Evan, troublé :
— « Quoi ? »
Lucy, les larmes coulant sur ses joues :
— « Toi… Je ne voulais pas partir sans que tu saches que je t'aime. »
Lucy et Evan étaient dans leur véhicule. L'homme conduisait, car j'avais tellement déversé ma rage sur Lucy qu'elle ne pouvait plus bouger le bas de son corps. Il y avait donc une chaise roulante dans l'arrière de la voiture.
Ils arrivèrent enfin sur les lieux où les recherches devaient débuter. La police était déjà là. Pour eux, c'était impressionnant : toutes les divisions, les cantons, les brigades étaient présentes.
Disons que je suis une star pour la police. Ils veulent tous me voir. C'est touchant… mais aussi douloureux. Suis-je un monstre ? Peut-être que oui…
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4. Chez moi
Pendant ce temps, de mon côté, j'étais allongé sur mon lit. Je pensais. Je me questionnais.
Gréy :
— « J'ai tué des centaines de personnes… mais je suis obligé d'avouer que m'en être pris à mes parents… ça me met un peu dans une situation particulière. »
À part le fait que je vivais seul dans la maison, la mort de mon père ne me faisait rien du tout.
J'ai brisé psychologiquement ma mère… et j'ai tué sauvagement mon père. Mais pourtant, je ne me sentais pas concerné. Au contraire… j'en voulais encore. Je voulais encore plus. Mon cœur avait encore faim.
Mais il fallait que je fasse profil bas au moins deux semaines, le temps que mes victimes capturées soient retrouvées et prises en charge par la police.
J'ai donc pris la voiture de mon père et, comme à mon habitude, j'ai roulé. Mais cette fois… il faisait jour.
Puis, je me suis arrêté dans un bar. J'avais envie de tuer. Mes mains tremblaient. Depuis déjà un mois, les victimes étaient rares.
Soudain, un homme est sorti du bar dans lequel je voulais entrer. J'en avais envie… mais il y avait trop de monde. Il me fallait autre chose.
Je me suis souvenu de ma mère ! Je pouvais retourner là où je l'avais laissée… pour m'amuser un peu.
Mais en vrai… j'aurais bien aimé de la viande fraîche. Mais ce mois-ci, je n'avais pas de chance…
Je suis donc parti vers la maisonnette. Oui… celle où Falone et moi nous étions assis. C'était là que je l'avais mise.
Sous cette maisonnette, il y avait une galerie souterraine… profonde, humide… parfaite.
Je suis descendu avec un sachet de chips à la main et une boîte à outils. Pour ne pas laisser de traces aux policiers, j'avais laissé la voiture loin et j'avais pris un raccourci dans la forêt.
Ma mère était là, attachée comme un chien. Et j'aimais ça. Je ne voulais pas qu'elle meure, alors je la faisais souffrir autrement.
Elle avait dans la bouche un bâillon de chiffon, et une chaîne nouée autour du cou. Bien évidemment… elle était vivante.
Je marchai vers elle en disant :
— « Dans la vie… il faut toujours savoir quelle arme nous sommes. Cela détermine le genre de relation qui nous sera bénéfique dans le futur. Moi, je suis plus une bombe. Pourquoi ? Parce que la bombe est une arme auto-destructrice. Elle n'est pas une arme qui change de camp, comme un fusil. Non… elle n'a pas de camp. Elle tue tout ce qui est proche d'elle. Mais en le faisant… elle est la première à mourir. C'est dans sa nature de tuer… en se donnant la mort. »
J'avais pris au passage une boîte en fer… ma préférée. Elle contenait tous mes outils… ceux qui rendent l'expérience de la mort plus vivante que jamais.
Ma mère tremblait. De peur, sûrement. Et cela… me plaisait énormément.