Le monde s’effaça.
Le rugissement du vent, la douleur, la peur… tout disparut.
Ryo flottait dans une mer sans ciel ni sol — une étendue infinie où le temps lui-même n’avait plus de sens.
Le Vide.
Son sanctuaire.
Le silence n’était pas le néant — il respirait, il observait.
Ici, le temps se pliait, se tordait, se dissolvait.
Une minute dehors… un mois à l’intérieur.
Et Ryo y demeura pendant cent ans.
Cent ans de solitude, de souffrance et de renaissance.
Cent ans à affronter ses souvenirs, ses fautes, ses peurs les plus profondes.
Chaque fois qu’il tombait, le Vide le relevait.
Chaque fois qu’il doutait, la voix l’appelait.
Gabriel.
Il ne se souvenait plus quand l’entraînement avait commencé.
Il ne savait plus s’il respirait encore.
Mais il savait qu’il changeait.
Les flammes noires qu’il craignait autrefois obéissaient désormais à sa volonté, tourbillonnant autour de lui comme un cœur vivant.
Le feu pulsait doucement — échos de son âme.
Et Gabriel apparut, non plus comme une ombre, mais comme une lumière au-delà de toute compréhension.
Ni ange, ni démon.
Quelque chose de plus grand.
> « Il t’a fallu cent ans pour me regarder sans peur, » dit la voix, résonnant à travers chaque fragment du Vide.
« Cent ans pour comprendre que je n’étais jamais la tempête… mais le miroir. »
Ryo leva les yeux.
Son regard était calme — perçant, mais apaisé.
> « J’ai passé ma vie à fuir ce que je suis. Je te prenais pour une malédiction.
Mais tout ce temps… c’est moi-même que je refusais. »
Le Vide trembla.
Des anneaux d’énergie spiralèrent autour d’eux, unissant ombre et lumière.
Gabriel tendit la main — ou peut-être était-ce Ryo lui-même.
Leurs formes se rejoignirent, et le Vide explosa dans un silence éternel.
> « Tu ne m’as pas maîtrisé, Ryo, » murmura la voix de Gabriel, sereine et infinie.
« Tu m’as compris. C’est pour cela que je suis à toi.
La véritable maîtrise n’est pas domination… mais union des âmes. »
Une lumière éclatante enveloppa Ryo.
Les flammes noires devinrent dorées, puis translucides, avant de se fondre dans son souffle.
Chaque battement de son cœur résonnait avec le monde.
Le Vide se referma lentement.
> « Gabriel… » murmura-t-il, les yeux ouverts sur la lumière.
« Marchons ensemble. À partir de maintenant, rien ne nous séparera. »
Et la voix répondit — douce, presque humaine :
> « Alors lève-toi, mon porteur. Le monde t’attend. »
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Quand Ryo rouvrit les yeux, il était de retour.
Le ciel gris du matin miroitait au-dessus des toits du village.
Le vent caressa son visage.
Cent ans s’étaient écoulés pour lui… mais à peine une minute dans le monde réel.
Une larme glissa sur sa joue — non pas de tristesse, mais de paix.
Le nouveau Ryo venait de naître.